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Chatila prend les morceaux de matière pour elle même, le support de ses peintures est  pour lui, comme un livre ouvert. Il lit des histoires dans la profondeur de ce matériau. Il concentre toute son attention et décide quels sont les points les plus intéressants à transformer toute en subtilité. C’est là que l’observateur peut trouver sa manière de peindre pour ainsi exprimer son regard sur le monde.

TRANSmission
“J’ai toujours eu l’obsession d’ aller chercher ou bien de “découvrir” tout ce qu’il y a derrière les choses.
Je ne supporte pas trop d’habiller la réalité avec des “belles robes” ; mais au fond… quel est la réalité ? Qu’est-ce que la vérité ?
Ce que l’on voit ou ce que l’on cache ?………… Souvent la lumière est derrière les choses”.

L’Histoire,  Chatila y puise des images irrésolues qui éludent la forme. Arriver à l’informe invite à ouvrir la voie de l’imaginaire de celui qui regarde.
D’abord, il garde de son observation le souvenir des strates de couleurs qu’il superpose finement et gratte jusqu’à saturation d’un geste répété, impulsif, rythmé d’incisions, de stries comme des cicatrices.
Ajouter et enlever la matière à la matière créant ainsi un chaos graphique  tout à la fois de griffes et de caresses.
Cette transformation privée du décor semble cacher un secret. Chatila pose la question du monochrome, par fines couches , il  y cherche  sa profondeur.
Qui a-t-il au delà des apparences ? Que dit-il ?
Est ce le fruit d’un désir de résister au geste destructeur de l’humain ?
Est ce le chaos nécessaire avant la naissance ?
C’est  en tout cas, une vraie fascination pour la matière du support qui l’amène à chercher  paradoxalement à la rompre ou à la soumettre à la force répétée de ses gestes.
Tirée jusqu’à la limite de sa résistance, de sa consistance, la matière, Chatila la travaille afin d’en tirer une autre réalité . Révéler une genèse enfuie sous les apparences, c’est  sans doute une manière, pour lui, de déterrer des vestiges pour les remettre au monde , de les rendre visibles.
Rien de mélancolique dans son approche, il n’ y a pas de retour en arrière. Seulement un geste amoureux de ce qui existe.

TRANSe
Chatila cherche à atteindre l’au delà de la matière. Toute son intimité à lui et son rapport à l’ objet qu’il travaille est mise en jeu.
La texture qui en résulte est l’écho de ses gestes rythmés qui cherchent la résistance  limite du support. Un corps à corps engagé dans l’atelier pour toucher le mystère.
Il est dans un autre temps.
De quel temps s’agit-il ?
Le temps comme un écart, une distance où l’avant  et l’après se combinent et se marquent du plaisir de la quête de liberté .
Aller de l’avant, ce qui importe c’est ce qu’il trouve comme lumière derrière, sous la courbe des choses et qui semble pousser vers nous. Capter une énergie là où elle n’est pas attendue. Nouer et dénouer les images pour révéler l’impermanence des choses par l’absence de repères.
Est-ce une manière de faire regarder au loin la tension à venir ? Un arrêt sur le fragile présent qui appelle à résister au rythme effréné du monde actuel ? Une analogie au manque de repère dans la multitude, la vitesse des images déversées sur la toile des médias désaccordés ?

TRANSformation
Chatila met la force, l’intensité de l’acte de la griffe d’abord sur la toile jusqu’à la faille, la déchirure.
Lorsqu’il décide de travailler sur l’alu pour sa résistance particulière et sa façon de répondre à ses sollicitations picturales de plus en plus intenses. Il cherche alors d’autres outils , plus percutants,  liés au métal.  Le marteau et le feu lui permettent d’explorer les effets des chocs sur l’alu surchauffé  tout en apportant une sorte de regard tendre sur cette transformation. Semblable à la sève  qui monte dans  l’arbre au printemps pour lui redonner vie.
Il montre ainsi que la matière peut aussi, évoluer, grandir, s’étaler, se déformer, souffrir et qu’ elle a  aussi ses fragilités . Sa présence est en attente d’une transformation pour exister autrement. Révéler un autre aspect d’elle même ignorée jusque là.

TRANSition du regard,
La quête de la  lumière dans  le support lui-même est devenu l’objet de son travail . Il la titille sous toutes ses dimensions, dans la profondeur, dans les  infinies vibrations des couleurs tirant parti  de leur surfaces pour ouvrir l’espace qu’elle  engendre.
Glacis fins de couleurs superposées, il aime les nuances qui sont pour lui comme des parfums semblables à des voyages, des saveurs  lumineuses à partager.
C’est une invitation à goûter son regard qu’il pose, savourer l’instant qui dit tout et n’impose rien, qui nous renvoit simplement à nous même.

TRANSpercé
Chatila revendique  par son impulsivité  sa vision de l’espace pour en  amener un autre qui à son tour en appelle d’autres vers des limites apparemment infranchissables. Et pourtant, il le franchit et passe à travers. Comme un champ qui attend la germination, la surface se bombe, se fend, pour faire jaillir la lumière. Une trouée sans frontière.

TANSgression
Basculer les limites pour les faire bouger, aller plus loin,  à rebours, à contre sens. Dire non est un éternel défi pour construire, naitre et grandir. C’est la vie qui a toute sa place ici.
Le  travail recto-verso dans la surface qui passe à l’espace comme si nous nous trouvions au beau milieu d’un paysage  immatériel.
Au seuil de la disparition, collages, griffures, défonçage pour une jubilation du défabriqué, il utilise la brisure comme moyen d’exister.

TRANSparence
Avancer jusqu’au vide de la transparence, envisager la totalité de la lumière. Remettre en question sa fluidité et le remplir de ses gestes perturbateurs, empêcheurs de tourner en rond. Chatila joue avec l’aspect organique de la matière synthétique pour amener une tension. C’est avec humour qu’il utilise les support où tout se voit, sans tromperie.
La profonde inscription des points successifs fondus recto-verso dans le célo transcrivent leur grammaire. Pas de ligne mais une myriade  de cônes qui scarifie la surface tel un ciel étoilé.

Quand au verre, c’est le collage de leurs brisures sur plexi qui viennent inscrire leur permanence comme un arrêt sur image d’un accident qui, vu ainsi, révèle des fines lumières glaciales et pures. Ils font du bien avec leur air fragile et précieux, posés au sol ou suspendus, ils emportent l’apesanteur de nos regard.

TRANScendance
Pas de tranquillité dans son travail de la répétition d’un geste.
Regarder une autre perspective de cette chose qui existe aussi dérisoire soit-elle. A la recherche de la simple jubilation d’être là.
Protéger la fragilité du présent, il semble que pour Chatila le tableau soit un mur protecteur de rêve.
Manipuler la matière est ainsi un dialogue avec le tréfonds du réel qu’il apprivoise. Il cherche à laisser la place au sublime de cette rencontre.
C’est à chaque fois la matière chrysalide qui se dématérialise, inoffensive, elle se soumet et se

TRANSfigure  en un autre état d’elle même.
Vers une vérité autre, l’écho des deux faces d’une même chose est donné en tant que  corps de la matière à notre regard qui s’agrandit.
Eviter l’oubli, la banalité, ajouter un bon assaisonnement, une méditation.
Où cela commence ?
Y-a-il une fin ?

Pas de réponses ici, mais un face à face avec la mobilité de l’instant, sa préciosité sans manière, toute crue qui conduit, si l’on s’y prête, à la contemplation.

Anne Welk